Le CEV face à la crise économique et financière

La crise économique et financière mondiale entraîne d’énormes répercussions dans tous les domaines de la société, que ce soit le monde des affaires, le secteur public mais également sur les individus et les organisations de la société civile. La récession touche pratiquement tout le monde et frappe tous azimuts. En ces temps de crise, les demandes adressées aux bénévoles doivent être traitées avec circonspection. Le bénévolat est certes un instrument efficace à plus d’un titre pour atténuer les effets de la crise. Toutefois, les parties prenantes doivent être conscientes que les défis et les pièges de la crise actuelle ont des incidences sur le bénévolat lui-même.

Le CEV a pour ambition une Europe où le bénévolat est un élément central pour la construction d’une société de cohésion et d’inclusion fondée sur la solidarité et la citoyenneté active. Notre réseau européen de centres de bénévolat et d’associations de bénévoles comporte 83 associations membres réparties dans 33 pays, ce qui représente plus de 17 000 associations au niveau local. Nous travaillons à la création en Europe d’un environnement politique, social et économique propice au plein développement du bénévolat.

Au travers du dialogue avec nos associations membres, nous notons une remarquable émergence du bénévolat dans plusieurs pays de l’UE : le bénévolat à l'heure actuelle semble bien être une alternative immédiate pour les personnes confrontées soudainement au chômage. Cela leur permet de maintenir leurs compétences et d’en acquérir de nouvelles, et aussi de conserver- ce qui est important- le sens de l’appartenance à la communauté locale, tout en créant des réseaux et du lien social. En ce sens, le bénévolat contribue à accroître l’employabilité des personnes. Les activités bénévoles ne sont pas non plus à négliger dans leur aspect social de rencontre entre personnes et de soutien mutuel ; elles donnent en plus le sentiment de se sentir utile et d’apporter une contribution à la communauté. On ne saurait trop insister sur l’impact de ces activités sur le bien-être personnel, ce qui permet d’éviter isolement et dépression.

Le CEV souligne aussi le fait que le bénévolat crée réellement de la valeur économique : pour chaque EURO investi dans le bénévolat, les bénévoles et leurs associations fournissent des services et produisent jusqu’à 13,5 fois* plus de valeur. Mais alors que cette valeur ajoutée est rarement prise en compte et que le CEV est sensible aux réticences concernant la valorisation purement monétaire des activités bénévoles, de nombreuses études montrent que la contribution économique des bénévoles et des associations est énorme – et que l’investissement dans le bénévolat est à la fois efficace et rentable.

Tout en reconnaissant les bénéfices de l'engagement  bénévole,  il est nécessaire d'éviter son instrumentalisation, c'est pourquoi CEV appelle toutes les acteurs de la société à s’engager à respecter les règles de bonne conduite du bénévolat , ci-après :

  1. Le bénévolat est une activité non rémunérée exercée de plein gréqui ne doit pas se substituer au travail rémunéré. Il est inacceptable de considérer le bénévolat et/ou les bénévoles comme une alternative bon marché à de la main-d’œuvre salariée, ou de profiter de la motivation altruiste des bénévoles pour réduire les salaires. Le travail rémunéréet non rémunéré sont complémentaires : ils ne sont pas antagonistes, mais au contraire se renforcent mutuellement.

    *Valuing volunteers in Europe. Etude comparée de l’investissement et de la valeur des bénévoles  http://www.voluntaryaction.info/euroviva.htm

  2. Pourtant même si le niveau du bénévolat augmente lors des crises économiques, on ne saurait attendre du secteur bénévole qu’il résolve le problème du chômage dans les pays. Le bénévolat ne dispense pas les décideurs et les partenaires sociaux de leur devoir d’assurer des emplois décents à la population active. Le rôle des associations est d’encourager l’accès pour tous à un bénévolat de qualité et non de servir d’agences de l’emploi.

  3. Le bénévolat doit être reconnu pour sa dynamique propre ainsi que ses valeurs et son caractère intrinsèques. Il crée de la cohésion dans la société, favoriseles relations entre les individus eux-mêmes et envers la société. Preuve vivante de la solidarité, c’est aussi l’expression d’une citoyenneté active fondée sur le libre arbitre et la motivation. Le bénévolat entraînant de nombreux effets positifs sur les individus et sur la société en général, nous devons éviter la tentation de l’instrumentaliser dans des buts ou des objectifs qui n’appartiennent pas à l’essence du bénévolat. Les bénévoles ne doivent pas être amenés abusivement à intervenir, comme ultime recours, dans des activités que le gouvernement a abandonnées ou des services qu’il a cessé de fournir.

  4. Cela signifie aussi qu’il ne faut pas toucher à l’un des éléments essentiels de l’éthique du bénévole : toute tentative de rendre obligatoires des activités bénévoles est une contradiction en soi. Nous demandons aux décideurs de ne pas saper la valeur du bénévolat en rendant obligatoire une quelconque forme d’engagement civique ni de « diriger » les gens vers le bénévolat. Cela aurait pour conséquence néfaste de rendre les concepts confus et d’anéantir la motivation positive et l’énergie des bénévoles.

  5. Le bénévolat, tout en étant une activité gratuite, n’est pas exempt de coûts. Les organisations encadrant l'infrastructure bénévole doivent être soutenues financièrement afin qu’elles soient en mesure à leur tour d’offrir des opportunités et des expériences de bénévolat de qualité et d’amener vers le bénévolat des citoyens qui ne le pratiquent pas encore, en particulier des personnes sans formation, connaissant la pauvreté et l’exclusion sociale. Des restrictions dans le secteur du bénévolat auraient un effet dévastateur sur l’accessibilité et la qualité des missions bénévoles.

C’est pourquoi, le CEV voit la nécessité d’instaurer un dialogue permanent entre toutes les parties prenantes, afin d’éviter les fausses attentes à propos du bénévolat et aussi de s’assurer que le bénévolat n’est pas utilisé comme un instrument, une solution pour des structures en échec ou des systèmes économiques confrontés à de sérieuses difficultés.

Le bénévolat est perçu au mieux de sa force et de son potentiel lorsqu’on le considère tel qu’il a toujours été, c’est-à-dire un moyen pour les citoyens d’exprimer et de vivre leur solidarité, et, ainsi, de créer du lien social, avec tous ses effets positifs tant sur le bien-être personnel que sur la bonne santé de la société en général. C’est le rôle qui lui est dévolu pour surmonter les crises économiques et financières.

Centre Européen du Volontariat, décembre 2010

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